Le 13 septembre 2018, Emmanuel Macron a réaffirmé la primauté de l’emploi dans la présentation de son plan de lutte contre la pauvreté. Le Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB) fait le point sur ces annonces qui, si elles semblent reconnaître la nécessité de lutter contre la pauvreté, manquent encore d’ambition et surtout d’inconditionnalité, critère essentiel à l’émancipation des individus et à leur liberté réelle.

Parmi les mesures phares annoncées par le chef de l’État, le renforcement de l’accompagnement des personnes en situation de précarité et la création en 2020 d’un « revenu universel d’activité ». Ce dernier consisterait en une fusion des minimas sociaux, sans que nous sachions pour l’instant lesquels seront ciblés et quel montant sera fixé. Pour le MFRB, il ne doit pas y avoir de perdants parmi les bénéficiaires actuels.

Le Président évoque la nécessité de « garantir à chacun un filet de sécurité ». Pourtant, ce revenu universel d’activité serait particulièrement conditionné : si une personne refuse deux offres d’emplois « raisonnables », elle perdra ce revenu. Jusqu’à présent, ni le RSA ni le RMI avant lui n’ont été autant conditionnés, car ils constituaient le dernier filet de sécurité sur lequel pouvaient compter les personnes les plus précaires.

« Sortir de la pauvreté ne devrait pas faire l’objet de conditions. Valoriser réellement l’apport de chaque citoyen à la société c’est surtout reconnaître sa contribution à la production de valeurs, qu’elles soient immatérielles ou matérielles. L’instauration d’un filet de sécurité, pour permettre une réelle dignité de chacun, ne doit pas faire l’objet de contreparties » (Nicole Teke, coordinatrice relations publiques du MFRB).

D’autre part, l’objectif affiché de ce plan pauvreté est le “retour à l’activité le plus rapidement possible”. Cette obsession du plein emploi, si présente dans l’ensemble des discours politiques, omet l’importance des conditions de travail précaires voire indignes que subissent de plus en plus de travailleurs et travailleuses en France. Comment ignorer le phénomène des travailleurs pauvres et des bullshit jobs ?

Le versement automatique, seule manière de lutter contre le non-recours

Par ailleurs, la première proposition du rapport sur « l’accompagnement des bénéficiaires du RSA » préconise de « rendre automatique l’accès aux droits ». Comme l’a rappelé Emmanuel Macron, 30% des potentiels bénéficiaires du RSA n’en font actuellement pas la demande. Ce problème ne pourra être résolu que par le versement automatique des aides afin de lutter efficacement contre le non-recours.

Sans l’apport d’un revenu garanti réellement universel, ces mesures ne sauraient résoudre l’enjeu principal de la pauvreté : le manque d’argent. Pour pouvoir sortir de la pauvreté, quelle meilleure option que de verser à chaque citoyen un revenu tous les mois ? Comme le mentionne ATD-Quart Monde, les huit milliards annoncés ne sont pas à la hauteur des enjeux de lutte contre la pauvreté, d’autant que ce budget était initialement prévu dans le budget de l’État. Cette annonce ressemble dès lors à une non-annonce sur le plan budgétaire.

Si la simplification des minima sociaux et l’accompagnement des personnes en situation de précarité sont des éléments essentiels, le MFRB rappelle la nécessité de mettre en place des droits universels, pas seulement réservés aux plus pauvres, et inconditionnels, libérés de toute exigence de contrepartie. Ce sont les conditions nécessaires pour une réelle lutte contre la pauvreté et la garantie d’une participation digne et émancipatrice à la société. Mobilisé à rencontrer les acteurs et décideurs pendant le travail préparatoire du plan, le MFRB se tient à la disposition des acteurs politiques et de la société civile pour avancer sur ces sujets essentiels.


Photo : Luis Felipe Salas