Note : Ce texte est une fiction, il est publié dans le cadre de notre cadre de notre Concours de nouvelles. Il est le reflet de l’imagination de l’auteur, et les idées exposées n’engagent pas le MFRB


La mise en place du Revenu de Base (RdB) ou Revenu universel d’existence (RUE) restera dans l’histoire comme un acquis sociétal qui marque depuis déjà deux générations le résultat d’une révolution lente mais hardie.

Cette année, durant le mois de mai, de nombreuses manifestations, articles et quelques ouvrages sont au programme.

Le Mouvement Français pour un Revenu de Base ne peut rester en dehors de ce mouvement car il a contribué, à sa mesure, au développement de cette idée et a participé activement à sa mise en place.

L’idée d’un revenu universel vient de loin, les premiers écrits remontent à plusieurs siècles, et quelques expériences menées dans des petits territoires avaient prouvé son utilité.

Plus près de nous, pour le Revenu de Base que nous connaissons actuellement en France, il nous faut remonter aux élections présidentielles de 2017 où Benoît HAMON, candidat du parti socialiste, l’inscrit dans son programme. Mal préparé, empêtré dans des explications variables, il a tenté de répondre aux différentes questions sur son coût venant principalement de ses détracteurs, et la réflexion sur le fond et le processus de mise en place ont été les parents pauvres du débat.

L’association Monrevenudebase avait réalisé plusieurs expériences avec des personnes volontaires tirées au sort, loin du réel. Le résultat avait été mitigé. Recevoir 1000 euros par mois pendant un an, pour la plupart des bénéficiaires, c’était comme s’ils avaient gagné cette somme au Loto.

Le rebond inattendu est venu du développement d’un coronavirus, le Covid-19, sur toute la planète, qui a prouvé que si le Revenu de Base Universel avait existé, les conséquences désastreuses sur la population et l’économie (les dépôts de bilan et l’augmentation du chômage) auraient été beaucoup amorties. Les milliards dépensés sans limite et sans savoir d’où venait cet argent pour lutter contre le virus et ses conséquences ont prouvé que c’était possible.

Il n’est pas inutile de revenir à la période où tout a basculé, rendant possible la mise en place du RdB.

En 2022, les élections présidentielles suivies des élections législatives ont porté au pouvoir une majorité acquise au Revenu de Base Universel.

Et d’emblée, un accord se fait sur le chemin à emprunter : c’est l’universalité de ce revenu qui est retenue.

De ce choix découle toute sa mise en place.

Quoique sur l’universalité il y ait plusieurs visions et que les contraintes ne soient pas inexistantes. Nous allons tenter de reprendre quelques définitions et les quatre questions qui se sont posées au départ, sans reprendre les nombreux débats : Pourquoi ? Pour qui ? Combien ? Comment ?

Le Revenu de Base Universel est un revenu versé par la société à chaque individu pour subvenir à ses besoins de base. Il n’a pas été prévu, et cela fut bien précisé dès le départ, comme le seul revenu possible.

À ce RdB s’ajoutent des allocations sociales spécifiques, personnalisées, suivant la situation de chaque famille, individu ou groupe d’individus ; ainsi que les revenus obtenus par l’occupation d’un emploi salarié ou d’une profession libérale, d’artisan, etc, et les pensions de retraite.

Le RdB est solidaire, il doit permettre à chacun d’assumer sa place, ses responsabilités au sein de la société. C’est la solidarité de tous envers tous les individus suivant les possibilités de chacun.

Une fois que le RdB est donné, il ne peut être retiré.

Les opposants au RdB

Les médias, les politiques de tous bords et tous ceux qui se disent « spécialistes » (économistes, sociologues…), heureux de tourner la page du coronavirus, se sont jetés sur le sujet. Nous avons retrouvé tous les arguments sur la mise en place des congés payés, des 40 heures puis des 35 heures, et celui selon lequel la Sécurité Sociale a pu s’installer après la Seconde Guerre mondiale parce que le capitalisme, affaibli par la collaboration, n’a pu organiser la riposte.

Les économistes qui ne voient que les dépenses sont incapables de dresser deux colonnes avec le positif et le négatif. Leur seule concession fut l’amélioration des aides sociales.

Revenu Universel Solidaire contre la pauvreté ?
Nous aurions pu croire que toutes les personnes et les organisations qui luttent contre la pauvreté se seraient emparées du Revenu de Base. Mais non. Pourquoi ?
L’une des raisons est le poids des traditions, de ce que nous avons appris il y a bien longtemps et de ce que nous montrent les médias, ou plus généralement les engagements de nos amis et voisins.
« Heureux les pauvres, le paradis leur appartient. »
« En aidant les pauvres, vous gagnez le paradis. »
Dans ce cas, nous voyons bien que le Revenu Universel Solidaire vient contrecarrer les espérances de « gagner son paradis », basées sur l’existence de la pauvreté et de pauvres à aider, à soutenir. Le RdB devait supprimer la pauvreté ou du moins la réduire. Au lieu de se réjouir qu’enfin la société serait plus égalitaire, les professionnels de la pauvreté ont perdu toute capacité de remise en cause en raison du risque de perdre leur raison d’être, leur reconnaissance par la société grâce à leurs actions valorisantes. Pour certaines personnes et certaines institutions, « aider les pauvres à vivre et à rester pauvres » aurait dû être leur garantie.

Pour les militants jusqu’au-boutistes, c’est tout ou rien. Le RdB doit être d’un montant suffisant pour vivre et bien vivre, pour tous et tout de suite.

Et enfin, les politiques d’opposition « hurlent » que le travail est le seul moyen d’avoir un revenu, confondant emploi et travail. Sauf pour les riches actionnaires.

POURQUOI ?

Sans attendre qu’un revenu soit versé aux 7 milliards d’habitants de la planète, la France a décidé de le mettre en place avec ses moyens.

POUR QUI ?

Pour chaque citoyen français demeurant en France. Lors de la mise en place, le RdB a été attribué les premières années aux plus de 16 ans, c’est-à-dire à 54 millions de personnes. Le RdB n’a pas été attribué :

  • aux personnes habitant à l’étranger par choix personnel,
  • à celles inconnues des services des impôts directs et de la Sécurité Sociale ou autre organisme d’assurance sociale.

Dès la quatrième année, le RdB a été attribué à toute la population, dès le premier mois après la naissance, pour des montants moindres. Les cartes de débit ne pouvant être remises aux nourrissons, les sommes sont réparties sur les comptes des parents. Sur ce point aussi il y a eu discussion, certains voulaient que cet argent soit bloqué jusqu’à l’âge où l’enfant peut le dépenser lui-même, avec dans l’idée de faire sauter le plafond, et en cas de décès de l’enfant le solde du compte aurait été remis aux parents. C’est l’argument économique de bon sens qui a été retenu : l’argent est ainsi immédiatement disponible au moment où la famille en a le plus besoin, et réinjecté dans l’économie.

Si le revenu est universel, il n’est pas imposé à tous, chacun peut faire valoir son choix de ne pas le recevoir. Malgré les nombreuses oppositions à ce système, il fut largement adopté et peu de citoyens laissent un compte bloqué.

COMBIEN ?

100 euros par personne. Cette somme retenue a fait l’occasion de vastes débats. Toujours trop pour les opposants, pas assez pour ceux qui n’attribuent qu’un objectif “social” au RdB dont le but devrait être la réduction des inégalités. Le choix de l’universalité, dès le départ, a imposé de démarrer sur un socle “possible, viable”.

De plus, aucune règle d’attribution des aides sociales n’a été modifiée, le RdB vient s’ajouter aux aides déjà perçues par le citoyen ou la famille.

Le RdB est un revenu et en tant que tel il est déclaré aux impôts sur les revenus. Il est imposable et se rajoute aux autres revenus.

Il ne saurait être un moyen de spéculation, le RdB ne peut être pérenne que s’il est rapidement réinjecté dans l’économie réelle. Chaque compte est bloqué à 6 mois d’attribution. Dans le cas d’un travailleur détaché par son entreprise, il retrouve l’intégralité du RdB à son retour. Donc la première année, le plafond était de 600 euros par personne, et après quelques années d’existence et le RdB augmentant, ce sont plusieurs milliers d’euros qui dorment sur certains comptes.

Lors du décès de la personne, le compte est simplement supprimé, le solde ne peut être transmis à quiconque.

COMMENT ?

Une caisse « Revenu de Base » a été créée. Elle gère les comptes de chacun.

Chaque individu possède un compte et chaque mois le montant du revenu de base y est ajouté.

Chaque individu a reçu une carte de type carte de débit (le compte est immédiatement débité et la somme versée aux commerçants) qui ne peut être utilisée pour des retraits d’argent (la caisse RdB n’est pas une banque) ainsi que pour des achats sur internet.

C’est bien le commerce de proximité qui est privilégié.

La première année fut une année de transition à l’échelle du pays, les dysfonctionnements nombreux furent assumés politiquement.

Un groupe de pilotage (suivi et propositions) fut mis en place, composé de 300 citoyens tirés au sort représentant toute la population et décentralisé par région pour être au plus près du déploiement sur le terrain. Durée de la mission : 3 ans, avec renouvellement par tiers tous les ans.

AUJOURDHUI ?

Les premières années de mise en place, la création de nouveaux outils a été laborieuse et le groupe de pilotage, qui est aujourd’hui dissous, n’a pas chômé.

Le Revenu de Base vient de passer à 500 euros, c’est encore loin de l’objectif fixé de 80% du salaire minimum.

Depuis 40 ans les emplois à temps partiel choisi se sont considérablement développés, ne mettant à aucun moment les entreprises en difficulté puisqu’elles se sont rapidement adaptées à cette situation.

On s’est aperçu que le RdB avait généré des économies, ce que les opposants avaient refusé de voir. Certaines aides sociales ont disparu car plus utilisées, par exemple l’aide au chauffage qui était de quelques centaines d’euros par an. Les aides sociales pour contrecarrer la pauvreté ont quasiment disparu. D’autres ont vu le jour en complément du RdB : tous les étudiants reçoivent une allocation supplémentaire en fonction de leurs moyens et de leurs études.

Un gros travail a été fait pour établir des impôts plus justes et les moyens pour alimenter la caisse de RdB.

Le RdB représente une manne financière que les banques voudraient bien s’accaparer. La démarche première, qui était que le RdB devait servir à l’économie locale, ne tient plus pour les financiers, car d’autres pays d’Europe ont mis en place un revenu minimum souvent limité pour les personnes “fragiles”. D’autre part, la liberté individuelle, souvent mise en avant pour que chacun puisse faire ce qu’il veut de “son argent”, peut stopper toute évolution si le cercle vertueux n’est pas conservé : il faut lui opposer la Liberté Solidaire, et cela passe par l’Économie Solidaire qui à son tour pourra alimenter la caisse du RdB.