En incluant un paragraphe mentionnant le « revenu de base » dans une lettre aux ministres de la zone euro, le gouvernement SYRIZA semble prêt à examiner la possibilité de mettre en œuvre un programme de revenu de base national. Mais les détails de ce programme restent à ce jour complètement inconnus.

Article initialement publié en anglais sur le site du BIEN.

Mercredi dernier, le ministre grec des finances, Yanis Varoufakis, a adressé une lettre à tous les ministres des finances de la zone euro incluant une liste des réformes que le gouvernement Syriza s’engage à mettre en oeuvre, dans l’espoir d’obtenir la prolongation du plan de sauvetage dont dépend actuellement la survie financière du pays.

La liste très attendue des réformes envoyée mercredi dernier inclut un paragraphe très ambigu mentionnant le concept d’un revenu de base garanti :

Etablir un lien plus étroit entre cotisations sociales et revenu, rationaliser les aides, renforcer les incitations à déclarer le travail rémunéré, et fournir une assistance ciblée aux employés entre 50 et 65 ans, y compris grâce à un système de revenu de base garanti [Guaranteed Basic Income scheme], de façon à éliminer la pression sociale et politique pour des retraites précoces qui pèse trop lourd dans le financement de la retraite.

La phrase a immédiatement été repérée par l’observateur économique Tom Hirt qui semble supposer que le gouvernement grec se prépare à mettre en place un revenu de base « accordé à des citoyens individuellement, sans conditions de ressources et sans contrepartie travaillée ».

Alors que l’article s’est propagé sur le net, nous ne savons toujours pas exactement ce que le ministre grec des finances avait en tête quand il a inclus l’expression revenu de base « garanti » dans sa lettre, d’autant plus que la phrase ne précise pas clairement si le plan s’appliquerait à toute la population ou juste un groupe d’âge ciblé, et s’il s’accompagnerait, ou non, de conditions.

Ce ne serait pas la première fois que le terme « revenu de base » serait confondu avec des idées similaires mais cependant distinctes, telle que le revenu minimum garanti, généralement compris comme un dispositif sous conditions de ressources, avec des contreparties de travail, rarement complètement universel, ni versé individuellement – contrairement à la définition du revenu de base du BIEN.

Jusqu’ici, Syriza n’a jamais publiquement discuté ou avancé l’idée d’un revenu de base universel, bien qu’il ait tenté de passer une proposition de loi en faveur d’un revenu minimum sous conditions de ressources en 2005 – sans succès. De fait, l’idée d’un revenu de base ne semble pas être très répandue parmi les membres du parti.

Il faut rappeler que la Grèce est l’un des rares pays européens qui ne dispose pas encore d’un revenu minimum garanti tel que le RSA en France.

En novembre 2014, des projets pilotes de revenu minimum ont démarré en Grèce. Ils concernent 13 communes, sur l’ensemble du pays, dans lesquelles 7% de la population a été sélectionné selon certains critères (revenu et chômage). Ces projets font partie du protocole d’accord entre le gouvernement grec et la « Troika » (FMI, BCE, et commission européenne) afin de pousser la Grèce vers la mise en place d’un revenu minimum.

Curieusement, la lettre de la Grèce à l’Union Européenne promet également d’ “évaluer le programme pilote de revenu minimum garanti dans la perspective de l’étendre à tout le pays.” Alors même que le ministre du Travail nouvellement élu, Panos Skourletis, a stoppé les expérimentations, aussitôt après avoir pris ses fonctions. Ce qui montre encore une fois que les intentions du gouvernement sont encore confuses à ce stade.

La situation politique en Grève pourrait devenir une opportunité pour le revenu de base, mais la partie est donc loin d’être gagnée. Il nous faudra attendre d’avoir plus d’information sur les intentions précises du nouveau gouvernement avant de se réjouir de la perspective d’un revenu de base en Grèce.


Credit picture CC Asteris Masouras